La MFWA Appelle les Autorités du Burkina Faso à une Relecture de la Loi Modificative n°044-2019/AN du 21 Juin 2019 du Code Pénal

Dans le cadre de ses efforts de promotion de la liberté d’expression en ligne et des droits numériques en Afrique de l’Ouest, la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) a mis en œuvre un projet intitulé :  » Améliorer la liberté d’expression en ligne en Afrique de l’Ouest francophone à travers le plaidoyer sur les Cyber politiques et l’Internet « .

Un rapport d’étude analytique sur les politiques nationales et l’usage de l’Internet a été produit et publié sur le Burkina Faso.

Selon les résultats de cette étude d’analyse ; deux thématiques majeurs ont été dégagés sur lesquels la MFWA interpelle les autorités du Burkina du Burkina Faso, et tous les acteurs des droits numériques et de la liberté d’expression sur internet et sur les réseaux sociaux à une relecture des cadres législatifs, et en particulier les dispositions répressives du Code Pénal.

Thématique prioritaire n°1 : La relecture du code pénal au Burkina Faso

Objectif : Demander au gouvernement et à l’Assemblée de procéder à la relecture de la loi modificative n°044-2019/AN du 21 juin 2019 du code pénal au Burkina Faso

Constat : L’adoption de la loi modificative n°044-2019/AN du 21 juin 2019 du code pénal a cristallisé les passions et les critiques au Burkina Faso. Les organisations de défense de droit de l’homme et des médias ont émis des réserves sur cette loi considérée comme violant le principe de la liberté d’expression, et plus précisément, celle en ligne.

Le libellé de cette loi permet de poursuivre tout citoyen, journaliste ou non, pour des publications liées au terrorisme. Elle est ainsi contraire à l’esprit des articles 20 et 25 de la Convention de l’Union Africaine sur le cyber sécurité et la protection des données à caractère personnel, de même qu’à la Déclaration universelle des droits de l’Homme.

Le code pénal impose aux journalistes l’autocensure sur les sujets liés aux forces armées nationales ou au terrorisme et les empêche de faire des publications en instantané ou en direct sur les attaques terroristes.

L’avènement du terrorisme entraîne la nécessité de réguler la circulation d’informations sur le sujet, notamment sur les réseaux sociaux, comme l’a justifié le gouvernement et l’ont défendu certains députés. Toutefois, l’introduction de termes vagues comme « la démoralisation des forces armées nationales », l’exigence d’une « autorisation préalable » avant la diffusion d’enregistrements sonores ou visuels sur les attaques terroristes sans préciser les procédures à suivre et les autorités impliquées dans l’octroi de ces autorisations, ouvrent la voie à une large interprétation qui peut conduire à des abus et à des violations de la liberté d’expression en ligne.

Sur le plan international, son adoption a fait réagir des organisations de liberté d’expression qui dénonce une loi qui cible précisément les journalistes en ligne et les internautes critiques.

En 2019, le pays a régressé également de la 36e à la 38e place, selon le classement mondial de la liberté de la presse réalisé par Reporters sans frontières.

Suggestions des Questions à poser :

  • Quelles mesures ou dispositions ont-elles été prises pour éviter les abus dans l’application de la loi ?
  • Quelles mesures ou dispositions ont-elles été prises pour préserver les journalistes et les citoyens des éventuels effets des ambiguïtés contenues dans la loi ?

Recommandations

Des dispositions de la loi modificative n°044-2019/AN du code pénal au Burkina Faso méritent d’être révisées pour clarifier les concepts ambigus qui peuvent ouvrir la voie à de possibles abus dans l’application de la loi contre les citoyens et les journalistes.

Cette relecture doit être faite en associant les organisations de défense des droits, en particulier celles des médias et des utilisateurs des réseaux sociaux.

Thématique prioritaire n°2 : L’adoption d’une codification spécifique de l’usage des réseaux sociaux au Burkina Faso

Objectif : Demander au gouvernement et à l’Assemblée nationale de lancer le processus d’une codification spécifique de l’usage des réseaux sociaux au Burkina Faso dans le but de renforcer la liberté d’expression en ligne au Burkina Faso

Constat : Au Burkina Faso, il n’y a pas de vide juridique « total » sur la liberté d’expression en ligne.  Toutefois, il n’existe pas de loi consacrant spécifiquement la liberté d’expression en ligne et citant clairement le droit des citoyens à pouvoir s’exprimer librement sur les réseaux sociaux. Cette liberté est déduite des dispositions légales nationales et internationales existantes. Mais cette situation comporte des lacunes liées au caractère spécifique des réseaux sociaux en particulier, et d’Internet en général.

Ce vide « partiel » entraîne l’adoption de dispositions légales « au cas par cas », en fonction des impératifs et des conjonctures du moment. C’est le cas de l’adoption de la loi modificative n°044-2019/AN du code pénal du 21 juin 2019 afin de faire face à la situation sécuritaire au Burkina Faso, marquée par le terrorisme. Cette disposition légale comporte des limites objectives qui ont été décriées par les organisations de défense des droits de l’Homme.

Par ailleurs, plusieurs internautes ont été condamnés en justice, pour des actes posés sur les réseaux sociaux, sur la base de l’interprétation de dispositions légales de droit commun qui n’étaient pas au départ destiné à Internet. Un état de fait qui peut comporter des risques d’abus et d’atteinte à la liberté d’expression.

Suggestions des Questions à Poser

  • Quelles sont les garanties que l’application de textes de loi non prévus spécifiquement pour les réseaux sociaux ne viole pas les droits des citoyens ?
  • Quelles sont les garanties que la non consécration explicite de la liberté d’expression en ligne évitera l’adoption de dispositions légales abusives ?
  • Les dispositions légales adoptées au cas par cas ont-elles pris en compte la spécificité des réseaux sociaux et d’Internet ?

Recommandations

La codification spécifique des réseaux sociaux s’avère nécessaire pour prendre en compte la spécificité de l’exercice des droits des citoyens sur les moyens virtuels de communication.

Mais la codification ne signifie pas la répression. Elle doit instituer et consacrer explicitement la liberté d’expression en ligne, garantir une plus saine jouissance de la liberté d’expression de chaque individu sur les réseaux sociaux.

Pendant son élaboration, la règlementation doit tenir compte de l’avis des organisations de défense des droits humains et celles spécialisées dans le domaine des communications électroniques.

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