Groupe de Défense des Droits des Médias en Afrique de l’Ouest Pétitionne le Président Ivoirien sur le Projet de Lois Répressifs de la Presse

La Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest(MFWA) et ses organisations partenaires nationaux de Afrique de l’Ouest ont pétitionné le Président Alassane Ouattara de la Côte d’Ivoire d’user de son influence pour garantir à ce que des sections du nouveau projet de lois qui vise à criminaliser les délits de presse soient annulées.

Dans la pétition adressée au Président Alassane Ouattara le 22 Mai 2017, la MFWA et ses organisations partenaires nationaux de la sous-région ont exprimé leur profonde préoccupation à propos de l’article 90 du projet de lois visant sanctionner les journalistes d’emprisonnement d’un a cinq ans et /ou d’amende de 300 000 à 3 000 000 francs CFA (US$511 a US$ 4988) pour les délits de presse.

Les pétitionnaires ont mis en lumière les possibles interprétations aléatoires de l’article 90 et ont par conséquent appelé le Président à intervenir.

«L’Article 90 pourrait donner lieu à une large interprétation, et pourrait être instrumentalisé à des fin d’harcèlements, de menaces, et d’intimidations de la part des personnes d’influences et des politiques pour taire les journalistes et les organes de medias, les obligeant ainsi à l’autocensure, et par conséquence affaiblir leurs habiletés à remplir leurs missions de quatrième pouvoir de l’Etat,» lit-on dans la pétition.

Les pétitionnaires ont exhorté le Président Alassane Ouattara  à garantir à ce que l’Article 90 du nouveau projet de lois sur la presse soit retiré pour éviter une situation où les médias ivoiriens exerceront dans la peur.

Le projet de lois a été introduit à l’Assemblée Nationale Ivoirienne le 5 Mai 2017 et est prévu pour être voté le 31 Mai 2017.

La MFWA a lancé un appel au gouvernement de la Côte d’Ivoire à s’assurer que les sections du projet de lois qui vise à étouffer les droits de la liberté d’expression des journalistes et des citoyens soient supprimées du projet en instance d’être voté.

Veuillez lire la pétition entière ci-dessous.

 Accra, le 22 Mai 2017

Présidence de la République de la Côte d’Ivoire

A Son Excellence Monsieur le Président de la République de la Côte d’Ivoire,

Objet : Pétition pour le Retrait de l’Article 90 du Nouveau Code de la Presse

Monsieur le Président,

Nous, la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest, et les organisations de défense de la liberté de la presse et d’expression ci-dessous signataires, nous vous écrivons pour vous exprimer notre profonde préoccupation à propos du projet de loi qui a été présenté devant l’Assemblée Nationale de la Côte d’Ivoire le 5 Mai 2017, et qui est en instance d’être voté le 31 Mai 2017.

Son Excellence, nous sommes particulièrement préoccupées à propos de l’article 90 du nouveau projet de code de lois sur la presse qui impose un emprisonnement jusqu’à cinq ans et une amende de 3 00 000 à 3 000 000 francs CFA, et qui stipule comme suit : «est puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 300 000 à 3 000 000 de francs, quiconque par voie de presse ou par tout autre moyen de publication : incite au vol et au pillage, au meurtre, à l’incendie et à la destruction par quelque moyen que ce soit, de biens publics et privés, à toutes formes de violences exercées à l’encontre de personnes physiques et morales ainsi que sur les biens, ou à l’apologie des mêmes crimes et délits ; incite à la xénophobie, à la haine religieuse, à la haine raciale et à la haine sous toutes ses formes ; fait l’apologie des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, des crimes de génocides ou de collaborations avec l’ennemi ; incite les militaires et des forces de l’ordre à l’insoumission et à la rébellion ; porte atteinte à l’intégrité du territoire national, à la sûreté intérieure et extérieure de l’Etat».

En effet, la disposition de l’article ci-dessus du nouveau code de la presse qui vise à pénaliser les délits de presse, n’est autre que la réplication des articles 174 et 175 du Code Pénal Ivoirien qui ont déjà pris en compte tous ces délits.

Nous reconnaissons que le journaliste n’est pas au-dessus de la loi, et que les dispositions 174 et 175 du Code Pénal Ivoirien s’appliquent à lui.

Par conséquent, l’introduction d’un nouvel article ciblant la presse est inquiétante, étant donné que cela donne l’impression d’une nouvelle volonté de la part des autorités de traiter les médias avec plus de fermeté. De surcroit, le nouveau projet de loi vise à remplacer la loi existante de presse 2004 qui statue clairement que les délits de presse ne doivent pas faire l’objet de peines d’emprisonnement. Ceci étant donc un recul pour la presse en Côte d’Ivoire.

Une autre préoccupation est le fait que l’article 90 pourrait donner lieu à une large interprétation, et pourrait être instrumentalisé à des fins d’harcèlements, de menaces, et d’intimidations de la part des personnes d’influences et des politiques pour taire les journalistes et les organes de médias, les obligeant ainsi à l’autocensure, et par conséquent affaiblirait leurs capacités à remplir leurs missions de quatrième pouvoir de l’Etat.

Au regard de ces points ci-dessus, nous vous exhortons, Son Excellence, d’intervenir pour garantir à ce que l’Article 90 du nouveau projet de lois sur la presse soit retiré pour éviter une situation ou les médias ivoiriens pratiquerons le journalisme dans la peur.

La crise récente en Côte d’Ivoire a plongé le secteur des médias dans une situation difficile de laquelle ils émergent progressivement.

Nous voudrions à cet effet, exhorter plutôt le gouvernement à engager les médias en Côte d’Ivoire sur comment les deux parties peuvent travailler ensemble pour redresser les myriades de défis auxquels sont confrontés la presse dans le pays.

Etant des organisations de la liberté d’expressions, nous continuerons de remplir les devoirs qui sont les nôtres dans la promotion du professionnalisme et le respect de la déontologie professionnelle par tous les médias et les professionnels des médias. Par conséquent, nous voudrions humblement solliciter de la part de votre gouvernement la bonne volonté nécessaire, le respect et la protection pour la liberté de la presse.

Au regard de ces observations ci-dessus, nous, les organisations ci-dessous signataires croyons que vous apprécierez la nécessité de la cause du retrait de l’article à polémique.

Monsieur le Président, nous croyons que vous êtes sincèrement attachés à la promotion des libertés fondamentales et à la jouissance des droits civils, politiques et à la liberté de la presse en Côte d’Ivoire. Nous croyons profondément que vous apprécierez l’urgence du retrait de l’Article 90.

Dans l’attente d’une suite favorable à cette pétition, veuillez recevoir, Son Excellence Monsieur le Président, l’expression de nos considérations distinguées.

Ont Signé:

Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA)-Ghana

Observatoire de la Liberté de la Presse, de l’Ethique et de la Déontologie (OLPED)-Cote d’Ivoire

The Gambia Press Union (GPU)-Gambie

Réseau Guinéen des Journalistes contre la Corruption et pour la Promotion de la Bonne Gouvernance (REGUIJOC)-Guinée

International Press Centre (IPC) – Nigeria

L’Observatoire de la Déontologie et de l’Ethique dans les Médias (ODEM)-Benin

Media Reform Coordinating Group (MRCG-SL)-Sierra Leone

Sindicato De Jornalistas e Tecnicos De Comunicacao Social Guinea Bissau (SINJOTECS)-Guinee-Bissau

Institut des Médias pour la Démocratie et les Droits de l’Homme (IM2DH)-Togo

Centre National de Presse – Norbert Zongo (CNP-NZ)- Burkina Faso

La Convention Des Jeunes Reporters du Sénégal (CJRS)-Sénégal

Centre for Media Studies and Peace Building (CEMESP)-Liberia

Observatoire Nigérien Indépendant des Médias pour l’Ethique et la Déontologie(ONIMED)-Niger

 

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