Juin 2019: Répression Sanglante des Manifestations Anti-Gouvernementales, Blocage d’Internet Entache le Paysage de la Liberté d’Expression

Le mois de Juin 2019 a été jonché de violations de la liberté d’expression en Afrique de l’Ouest avec des répressions sanglantes des manifestations anti-gouvernementales qui ont fait un mort en Guinée tandis que deux organes de presse ont été fermés au Nigeria et l’internet bloqué deux fois en Mauritanie.

Répression des Manifestants

Le 13 Juin 2019, une répression sanglante des forces de l’ordre, couplée avec des attaques des sympathisants du parti au pouvoir a causé la mort d’une personne et 22 autres blessés à N’zérékoré, en Guinée, la deuxième grande ville située au sud du pays. Plusieurs manifestants, membres du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC) ont été arrêtés et un couvre-feu a été imposé sur la ville.

Suite à la confrontation sanglante, le Préfet de N’zérékoré, Elhadj Sory Sanoh, a annoncé l’interdiction de toutes les activités de la FNDC sur tout le territoire sous son administration. Le préfet a aussi donné des instructions à la police d’arrêter et de poursuivre en justice quiconque se présente comme membre de ce mouvement.

Toujours en Guinée, la police a, le 16 Juin  2019, pris d’assaut la Maison des associations, une structure abritant les organisations de la société civile située à Matato, un quartier de Conakry et a violemment dispersé les membres d’un groupe de pression opposé au troisième mandat du Président Condé. Plusieurs membres du mouvement, effrontément dénommé A’Moulanfe (Cela ne se passera pas), ont été arrêtés et places en détention.

Il y eut une répression similaire au Sénégal le 14 Juin 2019, lorsque la police a violemment dispersé des milliers de manifestants exigeant la gestion transparente des ressources du pétrole du pays. Plusieurs manifestants ont été blessés, tandis que les principales figures dirigeantes des groupes de pression qui ont organisé la marche ont été arrêtées.

Le 23 Juin 2019, la police en Mauritanie a arrêté et détenu des dizaines de membres et sympathisants de l’opposition pour avoir protesté contre les résultats de la récente élection présidentielle.

Blocage des Réseaux Sociaux

Les autorités en Mauritanie ont bloqué l’accès aux réseaux sociaux dans le cadre de la répression policière sur les manifestations de l’opposition suite à l’élection présidentielle controversée dans le pays. La connexion internet sur les téléphones mobiles ont été bloquées autour de la mi-journée du 23 Juin 2019, rendant impossible pour la population de passer des appels ou d’accéder aux applications des réseaux sociaux sur les gadgets.

Ce fut la seconde interférence de l’internet en dix jours. Justifient cela comme une mesure de préventions des fraudes et tricheries durant les examens de fin d’année scolaire, le gouvernement de la Mauritanie a bloqué l’internet à travers le pays du 10 au 13 Juin 2019.

Le Liberia avait donné le ton aux violations des droits numériques le 7 Juin en perturbant l’accès aux plateformes des réseaux sociaux lorsque le gouvernement de George Weah faisait face à         la colère des Libériens qui ont pris d’assaut les rues par milliers pour protester contre la corruption et la mauvaise gouvernance présumées.

Des lois répressives

L’attaque contre la liberté d’expression en ligne a continué, cette fois-ci à travers des législations répressives ciblant les publications en ligne au Burkina Faso et au Niger. Le nouveau code pénal voté le 21 Juin 2019 par le Parlement du Burkina impose des sanctions y compris des termes d’emprisonnement et des amendes allant jusqu’à 10 million de francs CFA (près de 17350 USD) pour des publications par n’importe quel medium, «susceptible de compromettre la conduite d’une opération ou intervention des Forces de Sécurité et de Défense contre les actes de terrorisme». Le code exige de quiconque voudra publier des «images et des audio des scènes d’agression terroristes», d’obtenir une autorisation préalable

Une loi similaire controversée sur le cyber sécurité a été adopté au Niger le 25 Juin 2019, imposant des amendes de près de 8700 USD et des termes de prison allant jusqu’à trois ans pour des publications en ligne jugée compromettante de l’ordre public.

Agression des Journalistes

Le 5 Juin, un groupe d’agents de police ont brutalisé Kofi Bartels, un journaliste travaillant avec Nigeria Info, une station de radio privée à Port Harcourt. Bartels a été frappé et arrêté pour avoir filmé les brutalités policières exercées sur un adolescent. Les policiers «se sont retournés pour me gifler, me donner des coups de poings et de pied sur tout mon corps», a posté le journaliste sur Twitter.

Le 23 Juin 2019, des soldats ont agressé David Ankomah, un cameraman de Joy News basé à Accra lorsque ce dernier couvrait des protestations des clients de deux sociétés d’investissement. Les militaires ont été invités par le Pasteur Kossi Kobiri, propriétaire des deux sociétés, pour empêcher les clients mécontents qui essayaient de perturber le service d’église  à Zoe Outreach Embassy Church où le Pasteur Kossi est Pasteur Principal.

Dans un incident que la MFWA a décrit comme « typique des régimes militaires et autocratiques» et «inimaginable» au Ghana, des agents de sécurité national ont pris d’assaut les bureaux de ModernGhana.com le 27 Juin 2019, saisi les ordinateurs et arrêtés deux des journalistes de l’organe de presse. L’éditeur en chef adjoint, Emmanuel Ajarfor Abugri et Emmanuel Yeboah Britwum, un journaliste furent détenus pendant trois jours et soumis à des interrogatoires, y compris, selon les journalistes, des actes de torture. Le gouvernement a arrêté les deux sur les accusations de cybercriminalités qu’il a plus tard retiré. Les journalistes, ont cependant, insisté que leur calvaire était lié seulement à une publication critique sur le Ministre de la Sécurité Nationale.

Au Liberia, des policiers armés ont, le 10 Juin 2019, abordé Webster Castell, le journaliste sportif de la presse INQUIRER, au Stade Antoinette Tubman à Monrovia et l’ont arrêté. L’action fait suite à une plainte portée contre lui par Wilmot Smith, un Vice-Président de l’Association du Football du Liberia(LFA) par rapport à un article critique que le journaliste a écrit sur ce dernier.

Dans l’incident en question, les policiers ont saisi par la force le téléphone de Michael Solomon, un journaliste de Prime FM et supprimé ses images. Solomon a pris des photos de l’arrestation de son collègue, Castell et avait refusé de les supprimer comme lui demandaient les policiers.

Fermeture des Médias

Il y eut aussi plusieurs violations hors ligne durant le mois en revue. Dans une démarche largement perçue comme politiquement motivée, la Commission Nationale de radiotélédiffusion (NBC), l’organe de régulation des médias du Nigeria, a le 6 Juin 2019, suspendu de façon indéfini la licence de DAAR Communications PLC, operateur de African Independent Television (AIT) et RayPower FM, appartenant à Raymond Dokpesi, un membre dirigeant de l’opposition politique. La fermeture consécutive des deux stations était, cependant fut annulée par un ordre de la cour le lendemain.

Autres Développements

Dans d’autres développements, Gambia Press Union (GPU), organisation partenaire de la MFWA en Gambie, a lancé un projet de deux ans visant, entre autre objectifs,  à promouvoir la sureté et la sécurité des journalistes.

Du 27 au 28 Juin, les acteurs des médias, les forces de sécurité et la justice ont organisé une table ronde pour discuter des voies et moyens d’amélioration des relations entre les trois institutions en vue de protéger la sécurité des journalistes en Guinée. Entre autres participants des acteurs des médias présents, se trouvait l’Association Guinéenne des Editeurs de la Presse Indépendante (AGEPI), l’organisation nationale partenaire de la MFWA en Guinée.

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