« Je ne me laisserai pas intimider » : déclare un journaliste nigérian après 138 jours en détention

Olamilekan Hammed, un journaliste qui avait été arrêté et détenu le 13 mai 2022 par les Service de sécurité d’État (State Security Service) dans l’État d’Ogun, au Nigeria, a été libéré, après avoir passé 138 jours en détention.

Hammed a confirmé sa libération à la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) au cours d’un appel téléphonique.

« J’ai eu une mauvaise expérience en prison. Cependant, je n’y ai rien trouvé d’étrange, car lorsque j’ai décidé de faire du journalisme, j’ai toujours su que quelque chose de cette nature pouvait arriver. Cela arrive tout le temps aux journalistes qui dénoncent la corruption au sein du gouvernement », a-t-il déclaré.

Selon son avocat Habeeb Whyte, Hammed qui a été détenu au Maximum Correctional Centre d’Abeokuta, capitale de l’État d’Ogun, dans le sud-ouest du Nigeria, a recouvré la liberté le 27 septembre 2022, après qu’un juge de la Haute Cour fédérale d’Abeokuta a annulé son procès.

Le journaliste et éditeur du journal en ligne EaglesForeSigh a été arrêté après avoir publié un rapport sur le casier judiciaire présumé du gouverneur de l’État d’Ogun, Dapo Abiodun.

M. Whyte a déclaré que son client a été inculpé pour avoir publié sur « son site Internet des informations désobligeantes qui porte atteinte à la personne du gouverneur ».

L’article a été publié à l’origine par le journal privé en ligne Peoples Gazette et a révélé comment Abiodun aurait été arrêté pour fraude à la carte bancaire et falsification aux États-Unis d’Amérique en 1986.

Cette révélation a été faite dans une pétition visant à empêcher Abiodun de briguer un second mandat.

Mais Abiodun, par l’intermédiaire de ses avocats du cabinet Afe Babalola and Co, a déclaré que son arrestation probable n’était pas une condamnation et qu’il n’avait pas à répondre des lois qui s’appliquent aux criminels.

Après la republication de l’article, les services secrets de l’État d’Ogun, prétendument sur ordre du gouverneur, ont convoqué Hammed pour un interrogatoire. En arrivant à leur bureau, le journaliste a été placé en détention.

Hammed aurait été contraint de supprimer l’article republié sur son site Internet et de présenter publiquement des excuses au gouverneur, ce qu’il aurait fait. Par la suite, les services secrets l’ont mis en accusation devant le tribunal.

Kunle Somorin, le chef du service de presse du gouverneur, a publié une déclaration le 22 août, innocentant son patron de la détention du journaliste.

Cependant, Festus Ogun, qui auparavant représentait Hammed, a fourni un document prouvant que l’arrestation et la détention du journaliste avaient bien été effectuées sur ordre du gouverneur.

Deux semaines après avoir recouvré la liberté, Hammed a déclaré qu’il avait tourné la page sur son expérience carcérale et qu’il continuerait à publier des articles qui dénoncent des vérités sur le pouvoir.

« C’était une expérience traumatisante, surtout parce que je m’attendais à ce que certaines personnes me défendent, mais elles ne l’ont pas fait. Elles se sentaient intimidées et épuisées. À un moment donné, certains d’entre eux m’ont dit qu’ils ne pouvaient plus rien faire pour moi. Je me suis sentie délaissé, trahi et trompé. Ce qui m’a fait tenir le coup, c’est que je savais que j’avais fait ce qu’il fallait et que je finirais par voir la lumière au bout du tunnel », a déclaré le journaliste à la MFWA.

Quoi qu’il en soit, Hammed a déclaré que son expérience ne l’empêcherait pas de faire son travail.

« Je ne vais pas me laisser intimider. Je suis toujours du côté de la vérité et je ne m’arrêterai jamais. L’essence du journalisme est de dénoncer les maux et d’exposer les vérités concernant les personnes au pouvoir, je ne suis donc pas découragé par ma détention », a-t-il déclaré.

Hammed a répondu par la négative à la question de savoir s’il allait poursuivre le gouverneur, sur l’ordre duquel il aurait été détenu.

« Je n’engagerai aucune action en justice contre le gouverneur. C’est de l’histoire ancienne et je suis prêt à oublier le passé », a-t-il déclaré.

Dès son arrestation, la MFWA a condamné sa détention et a appelé les autorités nigérianes à le libérer. Après qu’il ait franchi le cap des 100 jours de détention, nous avons à nouveau souligné sa situation critique et demandé sa libération. Nous avons également mené une campagne sur les réseaux sociaux pour réclamer la liberté du journaliste.

Aujourd’hui nous nous félicitons de la libération de Hammed et sommes soulagés que le tribunal ait reconnu que les accusations portées contre lui étaient sans fondement. Néanmoins, le fait qu’il ait passé 138 jours en détention avant d’être libéré constitue une grande injustice, qui témoigne du fait que les autorités nigérianes sont désireuses d’abuser des systèmes judiciaires au détriment de la presse. Une répétition de ce genre d’injustice ne devrait pas être autorisée.

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