Des voyous d’un parti politique rudoient un journaliste

Dans un incident, signe inquiétant d’éventuelles menaces pour la sécurité des journalistes lors des prochaines élections de juin 2023 en Sierra Leone, des voyous d’un parti politique ont sauvagement agressé un journaliste qui couvrait une élection locale du parti au pouvoir. L’agression s’est produite le 28 mars 2023, à la suite d’une rixe entre les partisans rivaux des candidats à la présidence d’un département, ce qui laisse présager que les journalistes seront confrontés à l’insécurité au cours des élections générales.

Alie Melvin Tokowa, directeur de la station de radio, Fountain of Peace (FOP) 89.7FM, a été physiquement agressé par des partisans du parti au pouvoir, le Sierra Leone People’s Party (SLPP), lors des élections à la présidence du conseil départemental de Moyamba, qui se sont déroulées au siège du SLPP. Son téléphone a été endommagé par ses agresseurs, qui lui ont asséné plusieurs coups au cou et lui ont enfoncé la tête. Le journaliste a été gravement blessé.

Le journaliste a dû être évacué d’urgence au service de traumatologie de l’hôpital Connaught, à Freetown, la capitale, pour y être soigné. Il a été autorisé à sortir de l’hôpital le 31 mars 2023. M. Tokowa a déclaré à la MFWA le 13 avril 2023 que son état de santé se stabilisait, bien qu’il porte actuellement une minerve et doive se soumettre à de nombreux contrôles médicaux.

« J’étais incapable de respirer car ils m’ont étranglé et plaqué au sol. Ils m’ont ensuite frappé dans le dos avec une chaise, m’ont asséné plusieurs coups sur la tête et m’ont forcé à leur donner mon téléphone. Je serais mort si ce n’était de la grâce de Dieu », a-t-il déclaré à la MFWA, tout en exprimant des inquiétudes quant à sa sécurité et en se plaignant de maux de tête persistants.

Tokowa avait sorti son téléphone pour filmer une altercation qui avait éclaté entre des candidats du SLPP lorsque l’incident s’est produit. Comme l’a corroboré Jimmy Jombla, propriétaire de (FOP) 89.7FM, qui s’est également entretenu avec le MFWA, la dispute est survenue lorsque Joseph Lamboi, un des candidats, aurait commencé à soupçonner que certains responsables du SLPP manipulaient les procédures en faveur d’un autre candidat, Joseph Benedict Mbogba, qui est le président en exercice et l’actuel secrétaire départemental par intérim du SLPP.

Dans le feu de l’action, les partisans de Mbogba ont tenté de chasser les partisans de Lamboi de la salle, ce qui a entraîné l’altercation. Tokowa, qui a assisté à l’incident, s’est tenu à une distance suffisante pour pouvoir saisir toute la scène. Le journaliste aurait ensuite été attaqué, sur ordre de Mbogba qui l’avait repéré en train de filmer l’altercation. Il a fallu l’intervention d’un autre journaliste, Anthony Kamara, pour libérer Tokowa des mains de ses assaillants. Kamara a ensuite emmené Tokowa au poste de police pour porter plainte. Cependant, Tokowa a perdu connaissance et a été transporté d’urgence à l’hôpital pour y être soigné.

L’agression d’Alie Tokowa a suscité l’indignation dans le pays. L’Association des journalistes de Sierra Leone (Sierra Leone Association of Journalists, SLAJ) a condamné l’agression du journaliste et a appelé les autorités locales, les partis politiques ainsi que leurs partisans à respecter et à protéger les journalistes qui couvrent toutes les étapes du processus électoral, et à assurer leur sécurité à tout moment.

Le propriétaire de FOP 89.7 FM, Jimmy Jombla, a déclaré à la MFWA que les enquêtes de police étaient toujours en cours et que son entreprise attendait avec impatience que les auteurs de l’agression soient poursuivis.

« Je suis très triste, je veux vraiment que justice soit faite pour ce monsieur », a-t-il ajouté.

La Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) condamne avec la plus grande fermeté l’agression brutale dont a été victime Alie Tokowa et appelle les dirigeants du SLPP à identifier et à punir les coupables, sans pour autant porter préjudice aux procédures judiciaires en cours.  Nous demandons instamment au gouvernement et aux autorités de régulation des médias d’adopter une position ferme contre l’impunité des crimes commis contre les journalistes.

Le gouvernement et tous les partis politiques doivent sensibiliser et éduquer leurs partisans sur le rôle des journalistes tout en s’efforçant de créer un environnement sûr en amont, pendant et en aval des élections générales de juin 2023.

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