Deuxième anniversaire de la junte en Guinée : un site d’information bloqué et quatre manifestants tués

C’est sur une note sombre que la Guinée a célébré le 5 septembre 2023 les deux ans de régime de la junte. En effet, les autorités ont fait respecter de manière brutale l’interdiction de tout défilé. Quatre personnes auraient été tuées lors d’affrontements avec les forces de sécurité dans la capitale Conakry.

L’interdiction visait en particulier une marche de protestation prévue par l’opposition pour exiger un retour rapide à un régime civil.

Dans un communiqué publié la veille de la marche, le ministre de l’administration territoriale a rappelé au public « l’interdiction formelle des mouvements de soutien et des manifestations sur la voie publique » décrétée en mai 2022. Le communiqué « met en garde toutes les personnes qui enfreindraient cette mesure ».

Pour imposer l’interdiction, un grand nombre de forces de l’ordre ont été déployées dans les rues, en particulier dans les fiefs de l’opposition à Conakry. Certains jeunes ont protesté contre ce déploiement, ce qui a donné lieu à des affrontements avec les forces de sécurité.

Les Forces Vives, le groupe d’opposition qui chapeaute les manifestations, ont déclaré que quatre jeunes âgés de 15 à 18 ans avaient été tués lors de ces affrontements. Le gouvernement ne s’est pas encore prononcé sur ces décès.

Le 1er septembre 2023 (quatre jours avant le deuxième anniversaire du coup d’État de 2021), l’accès à Inquisiteur.net a été restreint dans le pays, ce que la direction du site d’information considère comme une attaque du gouvernement.

Contacté par la MFWA, Mamoudou Keita, journaliste et administrateur du média en ligne a indiqué que l’accès au site internet du média a été restreint après plusieurs tentatives d’intimidation par des cadres du gouvernement. Keita n’a voulu révéler aucun nom par mesure de sécurité.

« J’ai été appelé par un cadre de la présidence me demandant de décrocher un de mes articles » Keita a affirmé à la MFWA.

Publié le 5 juillet 2023, l’article remettait en question un bilan de la transition sur la croissance économique de la Guinée.

« Je suis profondément affecté par ce qui se passe. J’ai dû déclarer un congé technique. On a perdu certains de nos marchés car nous ne pouvons plus publier. Pour l’heure, je me contente de publier sur Facebook », a déploré Mamoudou Keita.

Un autre site d’information critique, Guineematin.com est inaccessible en Guinée depuis le 15 août 2023, privant ainsi les citoyens guinéens de leur droit fondamental à l’information. Toutefois, seules les personnes ayant recours à des réseaux privés virtuels (VPN) peuvent y accéder.

« Ils ont essayé de nous intimider, maintenant, ils essaient de nous empêcher d’exister », le fondateur de Guinéematin.com, Nouhou Baldé a confié à la MFWA au cours d’un échange téléphonique.

« On pensait que le problème était technique. Mais après avoir échanger avec le webmaster et l’hébergeur, ils m’ont dit qu’il n’y a aucun problème technique et qu’il faudrait vérifier avec les fournisseurs d’accès à Internet », a déclaré Baldé.

Hormis les analyses critiques et la couverture de l’actualité par son média, le fondateur de Guinéematin.com ne trouve aucun motif expliquant l’interruption de son site dont il souligne le caractère libre et indépendant.

L’Association Guinéenne de la Presse en Ligne (AGUIPEL) a saisi la Haute Autorité de la Communication le 28 août 2023. Le lendemain, Boubacar Yacine Diallo, le président de la HAC a sollicité l’aide de Mamady Doumbouya, directeur de l’Autorité de régulation des postes et télécommunications (ARPT), qui a indiqué que des investigations sont en cours.

Bien que nous nous réjouissions que guinéematin.com soit accessible à travers un site miroir, la majorité des guinéens reste peu éduquée quant à l’utilisation des VPN.

La MFWA condamne fermement les actes de censure et d’entrave à la liberté de la presse en Guinée, car constitutifs d’une violation flagrante du droit fondamental d’accès à l’information.

De ce fait, nous appelons les autorités guinéennes à mettre fin à ces restrictions et à respecter la liberté de la presse et d’expression, conformément aux principes démocratiques qu’elles ont promis de préserver.

Nous déplorons également le meurtre présumé de quatre manifestants par les forces de l’ordre et demandons aux autorités d’enquêter sur cet incident afin que justice soit faite.

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