Torture des Journalistes: L’histoire Douloureuse du Gambien Musa Saidykhan

Le régime du président gambien Yahya Jammeh, qui a soumis d’innombrables Gambiens à la torture et aux traitements et peines et traitements  cruels, inhumains ou dégradants pendant  plus de vingt ans, ne cesse d’ignorer systématiquement l’interdiction formelle et intangible de la torture.

À la lumière de cette pratique largement répandue et dans le cadre de la Journée internationale de soutien aux victimes de la torture (le 26 Juin), la Fondation pour les  Médias de l’Afrique de l’Ouest (MFWA) met en relief  l’histoire d’une victime de la torture gambienne: Musa Saidykhan.

En 2006, Saidykhan a été arrêté, détenu et torturé par les forces de sécurité gambiennes pendant trois semaines pour avoir exercé ses droits à la liberté d’expression et à la liberté de la presse. En 2007, la MFWA a aidé Musa à poursuivre en justice la Gambie à la Cour de Justice de la CEDEAO. En 2010, le tribunal  a statué en faveur de Musa, et a  constaté que la Gambie avait violé les droits de celui-ci à la liberté personnelle, au procès équitable, et à la dignité personnelle en vertu de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. La Cour a également accordé $ 200,000 US de dommages-intérêts  compensatoires.

PhotoGrid_1435254327210Les tribunaux des droits humains, tels que la Cour de la CEDEAO, peuvent apporter un soutien précieux aux  victimes en prévoyant des recours et des réparations. Musa lui-même décrit les tribunaux comme «les centres de réconfort pour ceux qui demandent la réparation. » Malheureusement, du fait d’insuffisances dans la mise en œuvre, la consolation de Musa fut de courte durée.

Dans une interview qu’il nous a accordée par courriel, Musa décrit son excitation initiale à la décision de la Cour, suivie par la déception quant à  l’inefficacité du jugement:

[En 2010,] J’étais ravi que la justice avait enfin prévalu dans mon cas. L’objectif ce n’est pas seulement pour  être compensé, mais aussi pour montrer à ou faire comprendre un régime dictatorial qui [violant] viole les  droits de l’homme a un prix amer à payer. J’ai décidé d’être un pionnier pour encourager d’autres victimes de la dictature du régime de  Jammeh à emboîter le pas. Si je n’avais pas décidé de tenter ma chance, d’autres victimes gambiennes n’oseraient demander réparation à la Cour de la CEDEAO. Oui, je continue  d’espérer que les dommages seront payés si la CEDEAO est engagée d’une manière appropriée.

[Maintenant], j’éprouve une certaine déception par le fait qu’un organisme sous-régional ait effectivement démontré son incapacité ou sa faiblesse pour mettre en application le verdict de la Cour communautaire de la CEDEAO. Les mêmes dirigeants de la CEDEAO qui ont approuvé la création et le financement de la Cour ne sont pas intéressés à protéger les droits de l’homme, comme en témoignent par leur manque d’intérêt à faire en sorte que les États parties sont obligés de se conformer aux décisions de  la Cour. De toute urgence, il faut que les dirigeants de la CEDEAO convainquent la Gambie à se conformer s’ils veulent être pris au sérieux. . . . La CEDEAO devrait même menacer la Gambie avec des sanctions ou l’expulsion pour sa non-conformité qui établit un mauvais précédent pour le groupement régional. . . .

Le refus  de la Gambie  de respecter  la décision de la cour a sans doute découragé de nombreux citoyens de la CEDEAO dont le gouvernement viole les droits. Comment peut-on convaincre ces victimes [à aller à la justice] quand il ya peu de possibilités qu’ils seront indemnisés après avoir gagné leur cause. Si je n’étais  pas aux États-Unis, mes enfants seraient comme ceux des Gambiens déplacées au Sénégal, dont les parents ne peuvent leur pourvoir à manger, sans parler de les envoyer à l’école. Ces enfants sans instruction  vont vivre avec la douleur et la colère, qui finiront par les faire devenir des délinquants. Je voudrai faire comprendre les  dirigeants de la CEDEAO que leur inaction  dans ces cas [comme la mienne] a une incidence directe sur les [autres] victimes et leurs familles éplorées. . . .

Je pense que le tribunal de la CEDEAO va agir  comme la Cour européenne des droits de l’homme et la Cour européenne d’appel en termes d’efficacité. Aucun pays de l’UE n’est assez courageux pour ignorer les décisions de ces tribunaux. Ce pays aura sa qualité de membre  et ses avantages examinés pour manque de respect envers l’UE. Il est temps que la CEDEAO examine  l’adhésion et les avantages de la Gambie.

Toute brave victime de torture qui cherche la justice auprès des tribunaux malgré les risques mérite de voir que  la justice imposée par les tribunaux  est mise en œuvre dans la pratique. Pour que  la CEDEAO et la cour de la CEDEAO accomplissent  leurs rôles en tant que défenseurs des droits humains et de la justice, l’impunité ne saurait pas être autorisée à prévaloir  en Afrique de l’Ouest. La MFWA rejoint Musa en appelant à la CEDEAO d’exercer ses pouvoirs en vertu de l’article 77 du Traité de la CEDEAO et d’imposer des sanctions contre la Gambie pour exiger  sa conformité. Il est temps de soutenir les victimes du roi de l’impunité de l’Afrique de l’Ouest et de leur accorder la justice, l’indemnisation et la fermeture qu’ils méritent si  grandement.

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